Détournements et dissimulations en succession : le recel successoral

L’une des principales sources de litige en droit des successions a trait au détournement dissimulé par un héritier à son seul profit d’un ou plusieurs bien(s) d’une succession ou à la dissimulation d’une donation reçue du / de la défunt(e).

Un héritier s’est accaparé en catimini un bien dépendant de la succession ou « omet », au cours des opérations de liquidation partage, de révéler une donation qu’il a reçue. Dans les deux hypothèses, il rompt l’égalité entre les héritiers dans le partage puisqu’il dispose d’actifs supérieurs à ses droits.

Une telle situation est relativement classique, notamment en cas de famille recomposée, l’hypothèse la plus fréquente étant alors celle de détournements et dissimulations au détriment d’enfant(s) du premier lit. Il n’est pas rare également de trouver de tels détournements et dissimulations au sein d’une fratrie issue des mêmes parents, particulièrement en cas de dissensions entre eux avec parfois le concours desdits parents ou de l’un d’eux.

Cette situation est bien connue de la législation sous la qualification de recel successoral dont le régime ressort des dispositions de l’article 778 du Code civil :

« Sans préjudice de dommages et intérêts, l’héritier qui a recelé des biens ou des droits d’une succession ou dissimulé l’existence d’un cohéritier est réputé accepter purement et simplement la succession, nonobstant toute renonciation ou acceptation à concurrence de l’actif net, sans pouvoir prétendre à aucune part dans les biens ou les droits détournés ou recelés. Les droits revenant à l’héritier dissimulé et qui ont ou auraient pu augmenter ceux de l’auteur de la dissimulation sont réputés avoir été recelés par ce dernier.

Lorsque le recel a porté sur une donation rapportable ou réductible, l’héritier doit le rapport ou la réduction de cette donation sans pouvoir y prétendre à aucune part.

L’héritier receleur est tenu de rendre tous les fruits et revenus produits par les biens recelés dont il a eu la jouissance depuis l’ouverture de la succession ».

En dehors de l’omission d’héritier, le recel successoral est ainsi constitué, pour un héritier, par le fait de dissimuler volontairement, à tout moment, certains effets d’une succession afin de se les approprier indûment et d’en frustrer ses cohéritiers en vue du partage.

Plusieurs considérations s’infèrent d’une telle définition.


Le recel

  • ne peut être commis que par un héritier au détriment de ses cohéritiers ;

  • ne peut porter que sur des biens successoraux (ou de communauté s’agissant du régime matrimonial) ;

  • peut avoir été commis avant ou après le décès ;

  • suppose de caractériser un fait de nature à fausser l’équilibre successoral (détournement et/ou dissimulation) - il s’agit de l’élément matériel ;

  • suppose la mauvaise foi ou l’intention frauduleuse de l’héritier receleur - il s’agit de l’élément moral.

Lorsque l’ensemble de ces éléments sont réunis et ainsi que le recel est constitué, il emporte deux conséquences majeures en forme de sanctions à l’encontre de l’héritier receleur.


L’héritier receleur

  • est réputé accepter purement et simplement la succession, peu important toute renonciation ou acceptation à concurrence de l’actif net antérieure. Il est dès lors indéfiniment tenu des dettes et charges de la succession, au-delà donc de l’actif successoral - cette sanction profite aux éventuels créanciers successoraux ;

  • ne peut prétendre à aucune part dans les biens qu’il a détournés et/ou dissimulés. Il doit dès lors les restituer afin que ses cohéritiers se les partagent sans lui - cette sanction profite donc à ses cohéritiers.


Si la solution n’est pas parfaitement tranchée en jurisprudence, l’action en recel successoral se prescrit par cinq années à compter du jours où l’héritier victime a eu, ou aurait dû avoir, connaissance des faits caractérisant le recel.

Il peut s’agir d’une action nettement complexe, d’ores et déjà au plan strictement juridique mais également au regard des preuves à apporter en vue de caractériser les éléments matériel et moral du recel, la charge de la preuve incombant à l’héritier victime.

Une telle action nourrit en tout cas un contentieux riche et abondant en matière successorale qui n’est pas près de se tarir au regard des évolutions actuelles.

Le concours d’un avocat peut s’avérer indispensable en la matière, particulièrement en cas de conflit. Celui-ci saura vous accompagner et vous conseiller dans toute démarche à suivre.


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