Legs aux communes, départements, régions

Les personnes morales de droit public que sont les collectivités territoriales comme la commune, le département ou la région, peuvent recevoir des libéralités, en particulier des legs (consentis par testament) ; elles sont dotées de la capacité de jouissance.

Il est ainsi de plus en plus fréquent aujourd’hui que des legs leur soient consentis. Il peut s’agir notamment d’un legs de somme d’argent, souvent pour en faire un usage spécifique (restaurer un bien appartenant à la collectivité par exemple), ou d’un legs d’un bien déterminé pouvant présenter une valeur culturelle ou patrimoniale pour la collectivité en cause. Certains legs sont même parfois une véritable chance pour une collectivité qui en donne alors souvent une résonance importante.

Le régime applicable à ces legs est en tout cas peu ou prou identique pour chacune ces collectivités (et également pour leurs établissements publics).

 

Régime applicable

En premier lieu, tout notaire en charge d’une succession présentant un testament contenant un legs en faveur de l’une de ces collectivités est tenu, dès l’ouverture dudit testament, d’adresser à la personne habilitée suivant la collectivité en cause (le maire pour la commune [1], le président du conseil général pour le département [2] et le président du conseil régional pour la région [3]), la copie intégrale des dispositions testamentaires. Cette copie est écrite sur papier libre et il est délivré récépissé des pièces transmises.

L’autorité compétente de la collectivité territoriale en cause (respectivement le conseil municipal pour la commune [4], le conseil général pour le département [5] et le conseil régional pour la région [6]) est alors habilitée pour accepter ou non le legs en cause. Elle peut déléguer son pouvoir au maire [7] ou au président du conseil général [8] ou régional [9] dès lors que la libéralité ne comporte ni charge ni condition. Ces mêmes autorités peuvent également accepter le legs à titre conservatoire jusqu’à la décision de l’autorité normalement compétente.

 

Réclamation de la part des héritiers légaux

Les héritiers légaux disposent pour leur part, à l’encontre de ce legs, d’un droit de réclamation obéissant là aussi aux mêmes principes suivant les collectivités.

Quelle que soit la collectivité en cause, la réclamation doit en effet être faite dans un délai de six mois à compter de l’ouverture du testament.

Ce délai apparaît potentiellement court. Pour pouvoir être en effet respecté, il suppose que les héritiers légaux disposent de toute l’information nécessaire, à la fois sur le décès du disposant et également sur le contenu du testament, ce qui peut s’avérer d’autant plus difficile sur ce dernier point qu’ils peuvent se voir opposer le secret professionnel par le dépositaire dudit testament, le notaire, et être ainsi contraints de solliciter le testament en justice.

La réclamation doit comporter les nom, prénoms et adresse des réclamants, leur ordre et degré de parenté vis-à-vis du défunt, ainsi que les motifs de la réclamation.

En cas de réclamation, le ministre de l’Intérieur informe le maire ou président du conseil général/régional et délivre aux réclamants un accusé de réception [10].

Contrairement au Code général de la propriété des personnes publiques pour ce qui relève des legs faits à l’État, le Code général des collectivités territoriales ne prévoit aucune disposition spécifique concernant la procédure à appliquer en présence d’une réclamation recevable en matière de legs fait à une collectivité, ce qui est nettement regrettable.

Il apparaît néanmoins qu’en pareille hypothèse, il faille faire application du principe issu de l’article 7 de la loi du 4 février 1901 aux termes duquel « dans tous les cas où les dons et legs donnent lieu à des réclamations des familles, l’autorisation de les accepter est donnée par décret en Conseil d’État », bien que n’ayant pas été repris au Code général des collectivités territoriales, il n’y a nul motif pour ne pas voir appliquer ce principe en vigueur et à portée générale.

En tout état de cause, indépendamment de cette procédure spécifique de réclamation, les héritiers légaux ou tout autre légataire intéressé ont naturellement toujours la possibilité de contester, pour tout motif de forme ou de fond, la validité du testament consenti au profit d’une collectivité territoriale devant les tribunaux judiciaires.

 

De telles procédures sont loin d’être rares, d’ores et déjà de par la nature même du legs qui crée un droit au profit de l’un qu’il retire souvent à l’autre. Elles le sont d’autant moins aujourd’hui dans le contexte de l’accroissement du poids de la transmission par décès.

Les collectivités se trouvent ainsi de plus en plus fréquemment contraintes de se défendre devant la juridiction judiciaire, à l’instar de toute autre partie, ce qui leur est parfois délicat financièrement ou moralement, quand ce n’est pas médiatiquement. De telles procédures sont ainsi susceptibles de présenter des enjeux majeurs pour elles dans leurs rapports avec leurs administrés et supposent d’être abordées avec précaution, comme les collectivités en ont d’ailleurs le plus souvent conscience.

Le concours d’un avocat peut s’avérer indispensable en la matière, particulièrement en cas de conflit. Celui-ci saura vous accompagner et vous conseiller dans toute démarche à suivre.


Le cabinet B | S Avocats, composé d’avocats experts en droit des successions, met son expertise et son savoir-faire à votre disposition afin de défendre vos intérêts et faire valoir vos droits.


[1] Article R2242-1 du Code général des collectivités territoriales.

[2] Articles R3213-9 et R3213-11 du Code général des collectivités territoriales.

[3] Note 3 Article R4221-8, alinéa 1er du Code général des collectivités territoriales.

[4] Article L2122-9 du Code général des collectivités territoriales.

[5] Article L1121-5 du Code général de la propriété des personnes publiques.

[6] Article L1121-6 du Code général de la propriété des personnes publiques.

[7] Article L2241-1 du Code général des collectivités territoriales.

[8] Article L3211-2, alinéa 2, 9° du Code général des collectivités territoriales.

[9] Note 9 Article L4221-5, alinéa 2, 8° du Code général des collectivités territoriales.

[10] Ces principes sont issus du Code général des collectivités territoriales, en particulier les articles R224-2 pour la commune, R3213-10 pour le département et R4221-9 pour la région.

Précédent
Précédent

Legs aux Etats et établissements étrangers

Suivant
Suivant

Détournements et dissimulations en succession : le recel successoral